[Théâtre des Célestins des Lyon (saison 2000-2001). "La...

[Théâtre des Célestins des Lyon (saison 2000-2001). "La Locandiera", de Carlo Goldoni]
droitsCreative Commons - Paternité. Pas d'utilisation commerciale. Pas de modification.
localisationBibliothèque municipale de Lyon
technique1 photographie numérique : couleur
descriptionAdresse : Théâtre de Célestins de Lyon, 4, rue Charles-Dullin, Lyon 2e.
historiqueC'est devant un vrai parterre de première que Claudia Stavisky a fait, [le 6 mars 2001], son entrée de metteur en scène, aux Célestins, qu'elle dirige depuis le début de cette saison, en compagnie de Gérard Deniaux. Le ban et l'arrière-ban de la culture lyonnaise étaient là. Jusqu'à des confrères parisiens, qui s'étaient déplacés pour ce micro-événement. Parlera-t-on de déception devant cette "Locandiera" de facture très classique, mettant en avant surtout le comique populaire, voire le farcesque de la comédie goldonienne ? Oui. Même si, en lui-même, le spectacle, qui doit encore affiner l'alacrité et la légèreté de son rythme, est de qualité et d'honnête tenue. Car c'est copie de bonne élève alors qu'on attendait de l'invention dans le regard, l'expression d'une patte signant plus de surprise, moins de convention. Hormis une faiblesse côté locandiera, Valentine Varela, avec de l'énergie, mais pas assez de rayonnement, n'ayant pas la présence escomptée pour le rôle-titre, tous les comédiens sont à leur place et, quoiqu'un peu tendus lors de cette première, excellents. C'est signe d'une bonne direction d'acteurs. Jean-Pierre Bagot et Marc Berman, respectivement le comte d'Albafiorita et le marquis de Forlipopoli, forcent à plaisir le trait, jusqu'à la caricature. Le premier promenant des attitudes fanfaronnes de barbon de commedia del l'arte ; le second, toujours menacé de déséquilibre, trébuchant grotesquement, butant à chacune de ses entrées et sorties dans quelque chose. Un bruit suspect de chute, et l'on sait que le marquis arrive. C'est là établir une amusante connivence entre la scène et la salle. Daniel Martin campe un Chevalier attachant, Gilbert Guerrero, un valet de comédie d'une jolie spontanéité, quant au jeu de Magali Léris et Martine Vandeville, oscillant comme le veulent leurs personnages de comédiennes entre outrance colorée et retour à la raison, il n'est pas sans nuance. Du personnage de Fabrizio. le "promis de l'hôtesse, de son interprétation par Francis Frappat, le seul à jouer dans un registre retenu, presque neutre, en tous cas décalé par rapport au reste, on dira qu'il est bien vu par le metteur en scène. Alors que tous dans cette pièce se livrent en effet avec délices ou frissons au jeu de rôles de la comédie sociale, au théâtre des sentiments, il est le seul à se contenter du réel. Au-delà de l'intrigue première, qui met en scène une femme libre qui se joue de l'amour des hommes avant de faire une fin, perce d'ailleurs ce qu'on pourrait résumer comme l'éternel conflit du monde comme représentation et du réel. Cette fiction théâtrale qui domine les personnages, qui ne cessent de mettre en scène leurs sentiments, car l'amour du comte ou du marquis pour Mirandolina est plus chimère et pose de l'esprit que réalité du coeur, c'est évident : ce théâtre social où chacun s'attache à jouer dans la surenchère son rôle, Claudia Stavisky les souligne dans sa mise en scène. C'est, pendant les changements de décor (peut-être un peu nombreux dans la première partie), une manière de faire se côtoyer machinistes et personnages, ou de faire commencer les scènes de reprise un quart de seconde avant que la lumière ne revienne éclairer le plateau. Illusions, artifices, outils du désir qui innervent ces existences. La fin pour être sage n'en est que plus brutale, et finalement pas drôle du tout, quand Mirandolina cessant de jouer et de rêver en revient au réel, à Fabrizio. Déception, disions-nous. Et oui. Car on ne reconnaît pas, dans ce spectacle, la Claudia Stavisky que l'on avait découverte audacieuse, voire radicale, les saisons précédentes à l'Ensatt. Assurer, pour une première, soit. Mais après, il faudra bien risquer. Source : "Un classique de chez classique" / Nelly Gabriel in Lyon Figaro, 8 mars 2001, p.30.

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